
Chapellerie
Savoir-faire ancestral, le chapeau était un accessoire incontournable de la garde-robe masculine jusqu’aux années 1950. Outre l’aspect pratique ou mode pour lequel on le connait aujourd’hui, les différents modèles de chapeaux étaient jadis signe de distinction sociale. La chapellerie dispose donc de multiples branches liées aux diverses cultures qui l’ont accompagnée. Haut de forme, canotier, Trilby, chapeau melon, Panama, Fedora (et non pas Borsalino qui est en fait une marque fabricant ce type de chapeau), béret, bob, sombrero, chapeau de cow-boy… En feutre de laine, de lapin, en paille, en cuir, en tissu… Le choix est infini !
Nous avons choisi de vous expliquer la fabrication du chapeau en feutre de poil, reconnu comme un chapeau très haut de gamme, car Sandra Barbiaux utilise ce savoir-faire unique pour la réalisation de ses chapeaux Fedora présentés sur le shop.
Ce sont les poils de lièvres, de lapins domestiques et de garenne, qui constituent la matière première du feutre de poil, feutre de grande qualité par opposition au feutre de laine plus ordinaire.
Ces poils, contrairement à la laine ou encore aux poils de chameau et de castor, sont des matières premières qui, dans leur état naturel, ne se feutrent pas. Ils doivent subir une préparation préalable nommée « secrétage », introduite en France vers 1730.
On utilisait le terme « secrétage », car autrefois la composition du bain était tenue secrète. C’est cette opération qui va donner au poil sa capacité à feutrer. Elle a pour effet de fendiller la surface du poil et de faire disparaître ses propriétés élastiques. Ainsi, les aspérités des poils s’agrippent les unes aux autres sous l’action de l’eau, du frottement et de la chaleur.
L’art du chapelier, reposant sur une spécificité de technologie et un nombre important de phases de fabrication, requiert des savoir-faire et des compétences particulières. Nous ne citerons que les principales étapes de la chaîne opératoire :
- Le soufflage
Cette opération consiste à mélanger plus intimement le poil et à éliminer toutes les impuretés. Le poil le plus fin et le plus léger est sélectionné par plusieurs passages dans une longue machine en bois et en fonte appelée « souffleuse ». La matière première est alors prête à l’emploi.
- Le bastissage
L’étape du bastissage donne naissance à la première forme du chapeau : la cloche. Le poil est étalé sur un tapis roulant, un cône métallique est placé à l’intérieur de la bastisseuse. En déclenchant le mécanisme, le poil, entraîné à l’avant, est projeté sur le grand cône perforé d’une infinité de trous. Ce dernier tourne lentement. Une aspiration puissante, placée sous ce cône fait adhérer le poil à la paroi métallique qui se répartit en une couche légère et uniforme. Le « bastissage » formé, il faut arroser d’une multitude de jets très fins d’eau chaude afin de permettre l’agglomération des poils. Cette opération achevée, le bastisseur dégage délicatement la cloche du cône métallique.
- Le semoussage
Ce procédé a pour but de donner plus de consistance aux cônes de feutre. Au sortir de l’atelier de bastissage, les cloches de feutre, d’environ 1m de hauteur, sont très fragiles. Elles doivent subir un premier feutrage manuel. Après un essorage mécanique, les cloches sont pliées par 5 ou 6 dans une feutrière et roulées en tous sens sur une table de fonte chauffée à la vapeur. Les poils vont s’amalgamer peu à peu et les cloches devenir ainsi plus résistantes.
- Le foulage manuel ou mécanique
Le foulage mécanique s’effectue par « passées » ou « foulonnées » sur un tapis de multiples cloches. Durant l’étape du foulage les cloches vont subir de nombreux procédés de pliages et dépliages durant 4 à 6 heures. Les cloches atteignent finalement environ 30 à 40 cm. Apprécier la qualité du foulage, est la chose la plus délicate en chapellerie.
- La teinture
La phase de teinture est une opération très délicate. La matière cornée de la fibre ne se mouillant pas aisément, il est assez difficile d’obtenir une pénétration uniforme dans toute la masse du feutre. On utilise des appareils à pression pour mener à bien l’étape de la teinture.
- L’apprêtage
Cette opération permet de donner une meilleure tenue au feutre. L’apprêt peut être utilisé sur les bords, la tête ou encore l’ensemble du chapeau. Il est appliqué au pinceau, à l’éponge.
- Les finitions
En chapellerie, ce terme désigne un ensemble d’opérations essentielles qui donnent à la surface du feutre son aspect définitif. Selon le travail que l’on effectue à la surface du feutre de poils et l’abrasif utilisé, on peut obtenir différentes finitions : ras, taupé (feutre imitant le velours), flamand (feutre à poils longs imitation la fourrure), mélusine (feutre à poils longs flottants) …
- Mise en forme mécanique et manuelle du chapeau
La mise en forme du chapeau peut se faire mécaniquement ou manuellement. Le formage mécanique est obtenu au moyen de machines, appelées « pédales », munies de matrices chauffantes en aluminium qui permettent un pressage rapide du feutre de laine, ou de poils, ou de la paille. La mise en forme manuelle se fait à partir de moules et de colliers en bois.
Le métier d’approprieur, comme celui de fouleur à la main, est l’un des plus valorisés en chapellerie. Sandra Barbiaux manie ce savoir-faire unique.
La première tâche est de redonner au feutre l’élasticité nécessaire pour le moulage en plaçant la cloche dans une marmite pour l’imprégner de vapeur. Puis le cône est tiré sur une forme de bois en tilleul, le moule, choisi selon de multiples critères notamment le tour de tête. La calotte doit être tirée uniformément sur tout son pourtour. Le chapelier place ensuite une ficelle à l’aide d’un avaloir pour marquer la séparation entre la tête et les bords et il replace l’ensemble dans la marmite.
Selon le chapeau à réaliser, le moule de bois avec la cloche est renversé sur un collier correspondant au bord du chapeau ou bien le feutre sera tiré sur des plots également en bois pour former le bord. Après séchage, le chapeau est démoulé et arrondi avec des ciseaux.
- Tournure des bords
Le métier de tournurier est apparu avec la fabrication des hauts-de-forme et s’est maintenu avec la mode des chapeaux melon. Au moyen d’un fer à repasser très chaud, le chapelier relève le bord en s’aidant d’une corde à brider pour lui donner une belle tournure. Un apprentissage de 3 ans est nécessaire pour certains chapeaux dont le bridé est important sur les côtés et s’affine sur l’avant et sur l’arrière, comme le Fedora Black Velvet de Sandra Barbiaux.
- Le garnissage
Dernière étape consistant à la pose des différents éléments qui viendront garnir le chapeau. Travail à la machine à coudre pour effectuer bords repliés, bordures à cheval. La confection de coiffes pour l’intérieur des chapeaux, la pose des cuirs, des galons extérieurs, la préparation des nœuds…